À la une de l'Antivol

Publication de L’Antivol-papier n° 19, juillet-septembre 2025

Nous avons le plaisir de vous annoncer que le nouveau numéro de L’Antivol-papier, correspondant au troisième trimestre 2025, vient de paraître. Il est toujours gratuit et contient des articles qui, nous l’espérons, vous intéresseront autant que les précédents.

Extension du domaine du capital

Publié en 2023, ce nouvel opus de Michéa a, entre autres mérites, celui de revenir sur les fondamentaux de la dynamique du capitalisme qu’ignorent, minorent ou rejettent tant de contemporains alors même que ces fondamentaux façonnent plus que jamais notre monde, intérieur ou extérieur. On les trouvera bien résumés dès les premières pages de l’ouvrage, à lire dans son intégralité…

Par Jean-Claude Michéa

Publié en 2023, ce nouvel opus de Michéa a, entre autres mérites, celui de revenir sur les fondamentaux de la dynamique du capitalisme qu’ignorent, minorent ou rejettent tant de contemporains alors même que ces fondamentaux façonnent plus que jamais notre monde, intérieur ou extérieur. On les trouvera bien résumés dès les premières pages de l’ouvrage, à lire dans son intégralité…

AVANT-PROPOS

Quand le capitalisme devient ce qu’il est

Guesde me disait : « Que ferons-nous un jour, que feront un jour les socialistes d’une humanité ainsi abaissée et ainsi avilie ? nous viendrons trop tard, disait-il avec une éloquente amertume ; les matériaux humains seront pourris, lorsque ce sera notre tour de bâtir notre maison »

Jean Jaurès, Discours des deux méthodes, 26 novembre 1900

Parmi les différents contresens qui rendent pratiquement impossible toute compréhension critique du capitalisme développé – et donc du type de monde vers lequel l’humanité moderne s’achemine à grand pas – , les deux plus meurtriers sont sans aucun doute ceux qui invitent à y voir un système dont l’esprit serait fondamentalement « conservateur » (certains vont même jusqu’à dire « réactionnaire ») et dont le champ d’action serait limité au seul domaine de l’économie. Une telle représentation du capitalisme est doublement erronée. D’une part, parce que, ce mode de production et d’échange reposant par définition, depuis maintenant près de trois siècles, sur la nécessité de mettre continuellement en valeur le capital déjà accumulé (ce qu’en langage libéral on appelle l’impérialisme de « croissance »), il lui faut donc sans cesse – comme le rappelait Engels en 1892 – « s’accroître et se développer, faute de quoi il se condamne à périr ». Et ensuite, parce qu’il s’agit là d’un système qui n’est pas seulement contraint – sous l’effet de chaque nouvelle crise que sa fuite en avant entraîne inéluctablement – de changer constamment de forme en libérant, l’une après l’autre, toutes les potentialités dont sa logique était porteuse depuis l’origine (en d’autres termes, un système qui se rapproche de sa forme « chimiquement pure » en devenant ce qu’il est). Il est également conduit – de façon tout aussi inexorable et sous l’aiguillon de cette même logique d’illimitation – à devoir progressivement « noyer dans les eaux glacées du calcul égoïste » (selon l’expression célèbre de Marx) toutes les autres sphères de l’existence humaine, y compris, comme on le voit aujourd’hui celles qui relevaient jusqu’ici de l’intime et de la vie privée (un « progrès » évidemment encore inimaginable à l’époque de Proudhon, de Marx ou de Bakounine). C’est donc d’abord pour rendre compte de cette extension continuelle du domaine du capital qui définit la triste et froide vérité de notre époque (et dont, comme on le verra, le néolibéralisme culturel de la nouvelle gauche américanisée – ce qu’on appelle aussi « le wokisme » – constitue, de nos jours, l’un des aspects majeurs) que j’ai proposé de décrire cette forme intégralement développée du capitalisme – en empruntant le concept à Marcel Mauss – comme un fait social total. Si l’on veut bien admettre, par ailleurs, que ce système historique singulier – dont l’ombre s’étend à présent sur toute la planète – a lui-même atteint le stade où il lui est devenu impossible de continuer à « s’accroître et se développer » sans mettre simltanément en péril, et de façon irréversible, toutes les conditions de possibilité anthropologiques et écologiques d’une société « libre, égalitaire et décente » (Georges Orwell), on comprendra alors mieux pour quelles raisons les prochaines étapes de sa fuite en avant continuelle (ce que ses partisans préfèrent célébrer, pour leur part, sous le nom de « Progrès ») n’ont, en réalité, que très peu de chances de déboucher sur un quelconque avenir radieux. Elles risquent bien plutôt de donner raison à Walter Benjamin, lorsqu’il écrivait, dans son essai sur Charles Baudelaire, que « la catastrophe, c’est lorsque les choses suivent leur cours ». À nous d’en tirer la leçon.

Extrait de Jean-Claude Michéa, Extension du domaine du capital.
Notes sur le néolibéralisme culturel et les infortunes de la gauche
, Albin Michel, 2023, p. 9-11

Pour plus d’informations et lire l’ensemble de l’avant-propos :
https://www.albin-michel.fr/extension-du-domaine-du-capital-9782226487339

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